« Le 24 mars 2020 », par Jacques Gonzales

Chaque année, le 24 mars, est commémorée, depuis 1882, la découverte par l’allemand Robert Koch de l’agent responsable de la tuberculose, le « BK ». La cause de la « peste blanche » était enfin identifiée, et le monde scientifique était sidéré. Les français, pour la plupart, négligent cette Journée mondiale de la tuberculose considérant que c’est désuet, car cette maladie n’existe plus.

Comme ils se trompent ! Un quart de la population mondiale est infectée sans présenter de symptôme net, un dixième a fait, fait ou fera une tuberculose maladie au cours de sa vie. En 2018, il a été dénombré 10 millions de malades et 1,5 millions d’humains sont morts dans l’année de tuberculose. Chaque jour, plus de 4000 personnes meurent de tuberculose.

Qui le sait ?

En Europe, en 2018, 23 000 personnes sont mortes de tuberculose, tandis que 259 000 nouveaux cas ont été recensés, soit un taux de mortalité de 8,8%. Pourquoi ? C’est en Europe que se trouve le plus grand nombre de tuberculeux incurables, leur BK étant résistant à toutes les thérapeutiques connues. Certes, bon nombre de ces malades ont conjointement une infection par le VIH, responsable d’un déficit sévère de leurs défenses immunitaires.

L’Organisation Mondiale de la Santé planifie chaque année des actions pour éradiquer la tuberculose dans le monde sans y parvenir et pourtant… une vaccination existe et cette maladie est évitable en prenant des mesures adéquates. La majorité des contaminations se fait en effet par voie aérienne : un tuberculeux tousse, crache et projette ainsi du BK devant lui, autour de lui. Un sujet infecté, non traité peut contaminer 10 à 15 personnes en une année.

Cette crainte était bien connue de nos anciens. Elle était si redoutée qu’elle a conditionné bien de nos gestes, à commencer l’habitude de mettre la main devant sa bouche en cas de toux… une habitude remise en question bien justement aujourd’hui. Il y a cinquante ans, seuls les acteurs en salle d’opération portaient des masques. Au début des années 60, la réanimation n’existait pas. Au sortir de la seconde guerre mondiale, la tuberculose était incurable… la méningite foudroyait des enfants, de jeunes adultes en moins d’un mois. Lorsqu’un antibiotique, la Streptomycine, fut découvert et testé, son efficacité fut discutée. Les américains qui avaient lancé cette thérapeutique l’abandonnaient la jugeant trop décevante. Les médecins français et, en tête, le Professeur Robert Debré, réussissaient, eux, en mettant au point les modalités de ce traitement à sauver les premiers petits malades au prix souvent de séquelles graves (destruction de l’oreille interne entrainant surdité et problèmes d’équilibre) en raison de la toxicité de ce nouveau médicament. D’autres thérapeutiques allaient suivre.

N’y a-t-il pas un parallèle avec ce que nous connaissons aujourd’hui avec le Covid-19 ? La similitude du mode du contagion interpelle tout comme l’absence réelle de traitement. Toutes les familles françaises comptent dans leurs ascendants des victimes de tuberculose. Espérons que cette pandémie, elle virale et non bactérienne, devienne rapidement curable. En tout cas, elle va produire durablement des effets sur la sécurité sanitaire comme ce fut le cas pour la tuberculose ; ces mesures de confinement qui peuvent paraître excessives à une petite catégorie de « confinosceptiques » vont sûrement faire place à des comportements nouveaux, à des gestes barrières qu’apprendront et pratiqueront les nouvelles générations, comme le lavage régulier des mains.

Nos pays développés avaient oublié que des pandémies comme la tuberculose existaient encore et que de nouvelles épidémies pouvaient nous ramener à ces époques que l’on croyait révolues. C’est dire l’intérêt du message d’espoir et de solidarité que représente la commémoration du 24 mars.

                                                                                                                                                     Jacques Gonzales
Un des premiers survivants dans le monde
d’une méningite tuberculeuse par la Streptomycine

Secrétaire général de la Société de Géographie
Professeur en médecine (er)

Enseignant à l’IPAG Business School

 

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