Manifeste « Redonner le goût de la géographie pour mieux habiter la planète »

 

Créée en 1821, la Société de Géographie, la plus ancienne du monde, fêtera le 15 décembre 2021 son bicentenaire. À cette occasion, cette société savante lance l’année de la géographie en France, en partenariat avec l’Académie des sciences morales et politiques et le Comité national français de géographie.

Les connaissances géographiques nourrissent l’ouverture d’esprit et constituent des clefs de lecture pour nous aider à décrypter l’actualité et à nous comporter de manière plus responsable à l’heure des défis environnementaux et de la mondialisation. Elles sont plus que jamais nécessaires. Cependant, l’intérêt pour la géographie recule parmi les plus jeunes. Un sondage récent souligne que la géographie en tant que matière scolaire était aimée par les générations les plus âgées et qu’elle est aujourd’hui quelque peu délaissée par les plus jeunes. Ce déclin de l’attrait pour la géographie chez ces derniers trouve en partie son origine dans une approche plus aride de l’enseignement de la discipline au cours des dernières décennies. De manière plus générale, l’enseignement actuel de la géographie est majoritairement considéré par les Français comme insuffisant, peu intéressant et peu motivant.

Pourtant, paradoxalement, les Français dans leur ensemble disent aimer la géographie. Ce sondage indique que l’attachement à la géographie transcende les catégories socio-professionnelles. La géographie est largement perçue par les Français comme une discipline les aidant à mieux comprendre les problématiques du monde actuel et qui les incite à voyager ou à découvrir d’autres régions, d’autres pays.

La géographie passe par les sens, le bruit du vent et des vagues, l’odeur du maquis et des roseraies, la splendeur des paysages, la beauté de la faune et de la flore, la saveur des produits locaux, la douceur du sable ou du gazon. Elle doit retrouver sa puissance d’évocation, faire comprendre et aimer le cadre de vie des humains et faire de nouveau rêver à des ailleurs enchanteurs.

La Société de Géographie souhaite se saisir de l’opportunité de son bicentenaire pour demander une politique publique ambitieuse en faveur de la géographie et redonner aux jeunes générations la curiosité de s’y intéresser.

 

Les propositions de la Société de Géographie

 

Donner une place centrale et transversale dans l’enseignement à une géographie ancrée dans le réel et l’expérience

 

  1. Améliorer la formation en géographie des futurs professeurs d’histoire-géographie : créer une vraie licence double, un CAPES et une Agrégation d’Histoire et Géographie, avec des programmes équilibrés (50%/50%). Instaurer une formation continue en géographie des actuels professeurs d’histoire-géographie historiens, qui sont surreprésentés par rapport aux géographes. Confier ce rôle aux Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (INSPÉ), en lien avec l’Inspection Générale et l’Association des Professeurs d’Histoire et de Géographie. Intégrer les enseignements de géographie dans les programmes du futur Institut du Service Public.

  2. Intégrer de manière systématique une sortie ou un voyage scolaire par an, à tous les niveaux d’enseignement.

  3. Utiliser des supports d’enseignements adaptés aux attentes des jeunes générations : films, documentaires, témoignages, expositions photographiques, internet, etc. Donner le goût de la lecture des récits de voyages et d’expéditions et de la cartographie.

  4. Promouvoir les stages et volontariats (collégiens de 3e, étudiants) dans les services d’urbanisme des 35 000 communes de France, les Directions régionales de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement, les Comités Régionaux du Tourisme, les organisations non gouvernementales nationales et internationales, les entreprises et les autres institutions liées à la géographie et au territoire.

 

Sensibiliser le grand public

 

  1. Favoriser la production et la diffusion de programmes audiovisuels valorisant les voyages et la découverte de la France, des territoires et du monde, mais comportant un vrai contenu géographique approfondi et séduisant car informé et surprenant. Faire participer des universitaires et des chercheurs à ces émissions, sur le modèle des émissions historiques, archéologiques, patrimoniales. Il s’agit de construire un regard critique et de lutter contre les fausses informations d’ordre géographique afin de décrypter l’actualité planétaire.

  2. Favoriser l’émergence d’une belle et solide revue de bonne vulgarisation géographique sur le modèle de L’Histoire, illustrée de cartes et de photos de grande qualité et qui serait utilisée par les professeurs du Secondaire, les élèves et les étudiants.

  3. Mettre en place des circuits de découverte des territoires par le cyclotourisme, les randonnées, le sport, des rallyes de découverte thématique dans les régions en collaboration avec les Offices de Tourisme, pour valoriser la connaissance des paysages, des spécialités gastronomiques, des parfums, etc. Promouvoir auprès des opérateurs de voyage la mise sur pied de circuits accompagnés par des géographes.

  4. Instaurer une Journée nationale de la géographie en y associant l’Éducation nationale, la société civile, les réseaux diplomatiques et culturels (Instituts français, Alliances françaises, établissements français à l’étranger), les entreprises… et en faire un temps fort de découverte du rôle de la géographie pour mieux comprendre le monde. Proposer à l’UNESCO d’en faire une journée mondiale.

 

Télécharger le manifeste au format pdf

 

7 Comments on Manifeste « Redonner le goût de la géographie pour mieux habiter la planète »

  1. excellent!

  2. Excellente initiative. Les propositions me paraissent toutes aller dans la bonne direction.
    Il faudrait effectivement renforcer l’enseignement de la géographie dans toutes les formations supérieures où elle peut avoir sa place légitime ( Futur ISP mais aussi aux IEP, à Sciences Po Paris,…
    Rétablir un équilibre entre enseignants de Géographie et d’Histoire dans le Secondaire.
    La mise en pratique est essentielle à l’occasion d’une journée de terrain.
    TB aussi l’initiative d’une revue de vulgarisation de haut niveau du type L’Histoire
    Une émission du type « Le dessous des cartes », très regardée par les étudiants, sur un format plus long et agrémentée de reportages permettant de confronter l’analyse des cartes au terrain géopolitique serait aussi une avancée intéressante.
    L’émission de Dominique Rousset  » Nos géographies » sur France culture est un apport actuel qu’il faut soutenir et encourager pour que sa diffusion puisse se prolonger au-delà d’une saison.

  3. Excellente initiative. L’enseignement de la géographie dans le secondaire a été appauvri depuis les deux dernières réformes qui ont supprimé toute géographie physique au profit d’une approche uniquement socio-économique. Particulièrement en collège, cela prive les élèves de bases pour une réflexion plus large et approfondie dans les classes supérieures. Il suffit de constater l’abysse que représente pour la plupart des élèves de 3e une carte de France sur laquelle on leur demande de placer quelques repères essentiels. Un retour au terrain et à la cartographie me paraît indispensable : géomorphologie, étude des paysages, connaissances des reliefs et climats sont les piliers manquants actuellement.
    Les programmes doivent mêler habilement tous les aspects de la géographie, physique et humaine pour reprendre les catégories traditionnelles. La géopolitique est également à intégrer plus sérieusement au collège (en 3e particulièrement).
    Une version ancienne des programmes de collège qui prévoyait une étude complète des continents en 6e 5e et 4e puis une globalisation en 3e avait sa cohérence.

    Un professeur d’Histoire-Géographie qui a eu la chance d’avoir une formation d’historien fortement teintée de géographie… et obtenu une meilleure note en géographie qu’en histoire au CAPES…

  4. Magnifique initiative,
    Si vous avez besoin de moi sur ce sujet je suis à votre entière disposition pour vous aider dans ce sens, de la façon dont il vous plaira (je suis membre de la société)
    Je suis géographe, enseignant au lycée Joffre de Montpellier, docteur en géographie (j’ai eu la chance et l’honneur d’avoir dans mon jury de thèse Monsieur Pitte pour une soutenance en 1995 à Bordeaux III) ; aujourd’hui je suis enseignant au lycée Joffre de Montpellier, webmestre du site d’histoire-géographie de l’Académie de Montpellier et j’anime un outil de veille à destination de mes élèves et des enseignants pour faire aimer la géographie : https://www.scoop.it/topic/univers-geographique. J’espère modestement y contribuer.

    A très bientôt
    amitié géographe
    Vincent Lahondère

  5. Excellente idée. J’ajouterais, pour les usagers du chemin de fer, un partenariat avec l’application de la SNCF pour proposer aux voyageurs, le temps de leur trajet, un programme audio qui leur explique la formation géologique et géographique des paysages qu’ils traversent.
    On pourrait rêver aussi, sur le même modèle, d’évocations historiques marquantes ou curieuses de la région…

  6. Xavier Leroux // 1 mai 2021 á 7 h 37 min // Répondre

    Et sur le point 1: ne pas oublier le premier degré… Tout cela commence bien avant la 6ème…

Répondre à Vincent LahondèreAnnuler la réponse.

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